Noms de rue de Bordeaux

La rue du Hâ, une rue immortelle

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La rue du Hâ à Bordeaux fait face au fort éponyme et il n’y aura pas de surprise si je vous dis que c’est la raison de son nom. Peut-être serez-vous par contre plus étonné de son surnom de « rue Immortelle », attribué juste après la révolution, pendant la terreur ?

Sommaire

Où se situe la rue du Hâ ?
D’où vient le nom du « Hâ » ?
La rue Immortelle, un surnom pendant la terreur

Où se situe la rue du Hâ ?

La rue du Hâ à Bordeaux se situe dans le quartier Pey Berland. Plutôt étroite, elle débouche à l’ouest sur la rue des Frères Bonnie, et sur l’Ecole Nationale de la Magistrature. A l’est elle rejoint le cours Pasteur.

Déjà en 1755 la rue du Hâ est présente sur les plans de la ville et du quartier Pey Berland. Même avec la quasi destruction du Château du Hâ (vers 1846 pour en faire une prison, puis vers 1969 pour le convertir en Ecole nationale de la magistrature), la rue a conservé son patronyme.

► Pour aller plus loin : découvrir le Château fort du Hâ

plan du quartier pey berland 1755 - 1855 et rue du hâ
Plan du fort du Hâ et de ses environs en 1755 et en 1855
Source : Bibliothèque de Bordeaux

D’où vient le nom du « Hâ » ?

La rue tire bien évidemment son nom de la même origine que le Fort ou Château du Hâ. En lui même, le mot « Hâ » vient du gascon « Far » qui signifiait Phare, Guêt. Il correspondrait à un fanal (grosse lanterne) qui était là pour éclairer les environs et les marais avoisinant de l’époque, autour du Peugue. La sonorité en gascon de ce mot correspondait à Ha (« f » aspiré, et « r » non dit). C’est donc cet orthographe qui a éyé retenu en français dans les différents écrits d’époque. Il a depuis été conservé.

La rue Immortelle, un surnom pendant la terreur

Durant la période de Terreur, la rue du Hâ a été surnommée « rue Immortelle ». Cette appellation provient de l’un des (tristement) illustres résidents de cet axe : Jean-Baptiste-Marie Lacombe, président de la Commission Militaire Révolutionnaire de Bordeaux. Cette commission était une cours provisoire (1793 et 1794), en marge de l’armée, destinée à juger rapidement (et souvent expéditivement) tous ceux qui étaient susceptibles d’actes de contre-révolution, d’opposition politique ou de crimes en relation avec l’état de guerre. Son but : maintenir l’ordre.

jean baptiste marie lacombe
J-B. Lacombe, d’après une gravure du temps
Bibliothèque de Bordeaux

Au delà de la position peu reluisante de président de cette commission, Jean-Baptiste-Marie Lacombe est surtout connu pour monnayer la clémence de ceux qui comparaissent. La trésorerie et la perception des amendes, pour un total de 7 millions de livres, est complètement opaque; et une très forte partie retombe dans les oeuvres personnelles de son dirigeant. En fonction du crime jugé, il faut avoir la bourse bien pleine pour échapper à la guillotine.

Jugement rendu par la commission militaire séante à Bordeaux qui condamne Marie-Hortence et Marie-Françoise Gronsit à être détenues jusqu’à la paix pour cause de fanatisme
Bibliothèque de Bordeaux

Finalement, Jean-Baptiste-Marie Lacombe rencontrera en personne la Veuve sur l’échafaud en août 1794 pour manquement aux devoirs de sa charge. Il laisse derrière lui 300 condamnation à mort sur ses 9 mois de présidence de la Commission Militaire Révolutionnaire. L’intégralité des jugements a été repris dans des éphémérides, disponibles sur Gallica.

Pour l’anecdote, c’est quand même très amusant de voir que dans cette rue, une agence immobilière a ouvert sous le nom de Danton 🙂

Sources

  • Google Maps et Street View
  • Gasconha.com
  • Source : Bibliothèque Nationale de France / BNF
  • Bibliothèque de Bordeaux
  • Le vieux Bordeaux : Légendes et souvenirs / par Maurice Graterolle… 1891
  • Le Viographe bordelais, ou Revue historique des monuments de Bordeaux tant anciens que modernes, et des rues, places et autres voies publiques de cette ville qui rappellent des événements mémorables… par M. Bernadau,… 1844
  • Chronique de Bordeaux, éphémérides des jugements de la commission militaire sous la Terreur à Bordeaux : distribution par mois, jour, nom, âge, profession, lieu de naissance des personnes qui ont comparu devant ce tribunal du 23 octobre 1793 au 31 juillet 1794 : pour faire suite aux « Éphémérides de la guillotine » – G Mirassem 1883
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