Le cadavre du Peugue : le secret enfoui sous les rues de Bordeaux

Faits Divers
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Sous les pavĂ©s de Bordeaux, l’histoire ne dort jamais. Quand les ouvriers du XIXᔉ siĂšcle dĂ©gagĂšrent les anciens Ă©gouts de la ville, ils ne s’attendaient pas Ă  exhumer le fantĂŽme d’un crime ancien. En 1842, sous la rue du Loup, dans le lit enseveli du ruisseau du Peugue, on mit au jour un squelette enchaĂźnĂ©, pris dans la glaise noire. La dĂ©couverte fit grand bruit : on disait que le corps datait du temps du Palais de l’OmbriĂšre, et que le Parlement y aurait fait “disparaĂźtre” plus d’un condamnĂ©.

🌊 Le Peugue, la riviĂšre oubliĂ©e

Avant de devenir un Ă©gout souterrain, le Peugue serpentait Ă  ciel ouvert depuis la porte d’Aquitaine jusqu’à la Garonne, longeant le cƓur mĂ©diĂ©val de Bordeaux. Ses rives accueillaient tanneurs, teinturiers, boulangers et, dit-on, les dĂ©chets de la justice : les restes des suppliciĂ©s du Parlement de Guyenne.

Pierre Bernadau note dans son Viographe bordelais :

“Le Peugue recevait tout ce que Bordeaux voulait oublier : les eaux sales, les chairs et parfois les ñmes.”

DĂšs le XVIIᔉ siĂšcle, on raconte que certains condamnĂ©s du Palais de l’OmbriĂšre n’auraient jamais atteint le Pilouret
 mais que leurs corps furent “livrĂ©s au Peugue”, en secret, par des geĂŽliers payĂ©s pour se taire.

Lavoirs proche du Peugue 1880
Lavoirs proche du Peugue 1880 Source : https://selene.bordeaux.fr/ark:/27705/330636101_DELCARTON_7_11

⚖ Une justice aux Ă©gouts

Les chroniqueurs du XIXᔉ siĂšcle rapportent plusieurs dĂ©couvertes Ă©tranges faites lors du comblement des Ă©gouts : chaĂźnes, fers, ossements humains mĂȘlĂ©s Ă  des fragments de bois. Un ouvrier de la rue du Loup aurait jurĂ© avoir trouvĂ©, en 1842, “un crĂąne percĂ© d’un anneau de fer”. Les autoritĂ©s parlĂšrent d’un ancien dispositif d’évacuation mĂ©diĂ©val, mais la rumeur prĂ©fĂ©ra y voir le corps d’un prisonnier oubliĂ© du Parlement, jetĂ© lĂ  pour effacer sa trace.

“Sous le Palais de l’OmbriĂšre, la justice ne s’arrĂȘtait pas toujours Ă  la sentence : parfois, elle continuait sous terre.” — Maurice Ferrus, Le Touriste Ă  Bordeaux, 1927.

💀 L’homme sans nom

Les journaux de l’époque surnommĂšrent la dĂ©couverte “le cadavre du Peugue”. Certains Ă©rudits affirmĂšrent qu’il s’agissait d’un moine pendu pour hĂ©rĂ©sie au XVe siĂšcle, d’autres d’un prisonnier de la Fronde Ă©liminĂ© discrĂštement. Les analyses de l’époque ne purent trancher : les ossements furent transfĂ©rĂ©s au dĂ©pĂŽt de la Chartreuse sans plus d’enquĂȘte.

Mais dans la mĂ©moire populaire, l’homme du Peugue devint une figure symbolique — celle de tous les oubliĂ©s du Parlement, engloutis par la Garonne ou par le silence.

đŸ‘» L’eau, la pierre et la mĂ©moire

Aujourd’hui encore, le ruisseau du Peugue dort sous la ville, canalisĂ© sous les rues Porte Dijeaux, rue du Loup et rue du Mirail. Les archĂ©ologues du MusĂ©e d’Aquitaine ont retrouvĂ©, lors de fouilles rĂ©centes, des fragments de bois et des os humains d’époque moderne dans ses anciens conduits.
Rien ne prouve qu’ils soient liĂ©s au Palais de l’OmbriĂšre
 mais l’idĂ©e que la justice bordelaise ait eu ses secrets enfouis continue de fasciner.

Et lorsque la pluie gonfle les caniveaux du vieux Bordeaux, certains jurent entendre, sous le murmure de l’eau, le cliquetis d’une chaüne.

đŸ€“ FAQ pour briller en sociĂ©tĂ©

👉 Le Peugue, c’est quoi ?
Un ancien ruisseau de Bordeaux, aujourd’hui recouvert, qui traversait la ville du sud-ouest vers la Garonne.

👉 A-t-on vraiment trouvĂ© un cadavre ?
Oui : des ouvriers du XIXᔉ siĂšcle ont bien dĂ©couvert un squelette enchaĂźnĂ© dans le lit du Peugue. L’affaire fit l’objet d’un rapport municipal en 1842.

👉 Était-ce un prisonnier du Parlement ?
Rien ne le prouve, mais le peuple y vit aussitĂŽt le signe d’un condamnĂ© oubliĂ© du Palais de l’OmbriĂšre.

👉 Peut-on encore voir le Peugue ?
Non, il est entiÚrement canalisé, mais son tracé subsiste sous les rues Porte-Dijeaux, du Loup et du Mirail.

📚 Sources à mentionner dans WordPress

  • Pierre Bernadau, Le Viographe bordelais, 1843 – Gallica / BnF
  • AbbĂ© Patrice-John O’Reilly, Histoire complĂšte de Bordeaux, 1857 – Gallica / BnF
  • Maurice Ferrus, Le Touriste Ă  Bordeaux, 1927 – Gallica / BnF
  • MusĂ©e d’Aquitaine, Fouilles du Peugue et de la DevĂšze, 1990 – musee-aquitaine-bordeaux.fr
  • Archives municipales de Bordeaux, Travaux d’assainissement, 1842–1845 (sĂ©rie O).
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