La Porte Cailhau : forteresse, triomphe et symbole royal de Bordeaux
Difficile de passer place du Palais sans lever les yeux : la Porte Cailhau, avec ses pinacles et sa silhouette de château miniature, semble tout droit sortie d’un conte médiéval. C’est pourtant un vrai morceau d’histoire bordelaise, vestige des remparts et témoin de la grandeur du pouvoir royal. Depuis plus de cinq siècles, cette porte veille sur la Garonne et sur les promeneurs émerveillés.
🕰️ Timeline historique : la Porte Cailhau à travers les siècles
📜 XIVᵉ siècle – Une porte dans les remparts
À l’origine, la Porte Cailhau n’était qu’une ouverture fortifiée donnant accès au vieux port du Palais. Elle tire son nom soit d’une famille bordelaise influente, soit du mot gascon calhau (“caillou”), en référence aux galets de la Garonne.
🏗️ 1493-1496 – Reconstruction royale sous Charles VIII
Les jurats de Bordeaux décident de rebâtir la porte, cette fois en pierre de taille. C’est l’un des premiers monuments de la ville à adopter un style gothique flamboyant teinté de Renaissance. L’abbé O’Reilly note : « On fit bâtir la Porte Cailhau, appelée quelquefois Porte Royale, comme pour perpétuer la mémoire de la victoire de Charles VIII à Fornoue. »
👑 1496 – Hommage à Charles VIII et à la monarchie
La façade côté Garonne porte la statue du roi, célébrant la puissance française retrouvée après la domination anglaise. La Porte Cailhau devient un symbole du pouvoir royal, un véritable arc de triomphe à la gloire du monarque.
⚙️ XVIᵉ siècle – Porte du Palais de l’Ombrière
Elle devient l’entrée d’honneur du Parlement de Guyenne. Les cortèges officiels franchissent son pont-levis avant de rejoindre le Palais de l’Ombrière.

⚔️ XVIIᵉ – XVIIIᵉ siècles – Fin des remparts, mais pas de la légende
Les fortifications sont détruites, mais la Porte Cailhau subsiste. Elle reste un repère pour les marins et un symbole du Bordeaux médiéval.
🪓 1793 – La Révolution efface le roi
Le buste de Charles VIII est abattu, remplacé plus tard par une copie du XIXᵉ siècle.
🧱 XIXᵉ siècle – Sauvetage et restauration
Sous l’impulsion de Charles Durand, la porte échappe à la démolition. Elle est restaurée et classée Monument historique.

🎟️ XXᵉ siècle – De monument à musée
La Porte Cailhau devient un centre d’interprétation du patrimoine médiéval, ouverte à la visite et fièrement mise en valeur.
🧱 Anatomie d’une forteresse raffinée
Sous ses airs de conte, la Porte Cailhau cache une structure défensive redoutable :
- Épaisseur des murs : jusqu’à 2,20 m, pour résister aux boulets.
- Taille : 35 mètres de haut, 17 mètres de large.
- Pont-levis : franchissant autrefois le fossé d’eau du Peugue.
- Mâchicoulis et meurtrières : typiques du gothique militaire.
- Matériaux : pierre blonde de Saint-Macaire et charpente en chêne.
- Décor sculpté : pinacles, frises végétales et coquilles ornent la façade.

Son architecture marque la transition entre le gothique flamboyant et la Renaissance : un style à la fois défensif et élégant, reflet du prestige de la ville et du roi.
👑 Charles VII et la gloire du pouvoir royal à Bordeaux
Avant Charles VIII, c’est Charles VII – le roi de la reconquête française – qui joue un rôle fondamental dans l’histoire bordelaise. C’est sous son règne, en 1453, qu’a lieu la bataille de Castillon, marquant la fin de la domination anglaise. Bordeaux redevient définitivement française.

Cette victoire fait de Charles VII un symbole fort pour la ville. Elle prépare le terrain à l’essor d’une nouvelle génération de monuments royaux — dont la Porte Cailhau. Sa construction, quelques décennies plus tard, illustre cette fierté retrouvée et la volonté d’inscrire Bordeaux dans la gloire du royaume. La porte devient alors le témoin architectural de la fidélité de Bordeaux à la Couronne, à un moment où la monarchie veut affirmer son autorité dans le Sud-Ouest.
⚙️ La Porte Cailhau pendant la Révolution et sa restauration
Lorsque la Révolution éclate, la Porte Cailhau devient un symbole du régime honni : la statue royale est détruite, et l’édifice, vidé de sa fonction défensive, se dégrade. Pendant un temps, certains songent à la raser pour élargir l’accès aux quais.
Mais au XIXᵉ siècle, les Bordelais redécouvrent la valeur de leur patrimoine. L’architecte Charles Durand et les érudits de la Commission des Monuments historiques s’engagent pour la sauver. En 1883, elle est officiellement classée monument historique. Les travaux de restauration redonnent vie à ses sculptures, à ses toitures d’ardoise et à ses gargouilles. Aujourd’hui encore, elle apparaît presque telle qu’au XVe siècle, témoignage du soin apporté à sa préservation.

⚔️ Fonction et rôle symbolique
La Porte Cailhau n’était pas qu’un passage : elle incarnait le prestige de la cité. Côté fleuve, les voyageurs découvraient la statue royale comme une proclamation de fidélité au roi de France. Côté ville, elle ouvrait sur le Palais de l’Ombrière, siège du Parlement. Elle était à la fois porte de défense et arc de triomphe, mêlant utilité et majesté.
🧠 Anecdotes techniques et curiosités
🔩 Une porte qui penche : la tour nord présente un léger dévers dû au sol marécageux.
💧 Un puits caché : un puits intérieur, aujourd’hui comblé, servait aux gardes.
🔊 Acoustique médiévale : la voûte en croisée d’ogives amplifiait les proclamations des jurats.
⚒️ Chantier colossal : près de 500 ouvriers mobilisés pour achever le chantier en trois ans.
🌇 La Porte Cailhau aujourd’hui
Classée parmi les monuments emblématiques de Bordeaux, la Porte Cailhau est aujourd’hui un lieu de visite incontournable. On peut y monter, admirer ses charpentes et profiter d’une vue unique sur la Garonne et le Pont de Pierre.

Source : https://gallica.bnf.fr/
À l’intérieur, des maquettes et panneaux racontent l’histoire du Bordeaux médiéval et de ses fortifications.
Le soir, la porte s’illumine : ses ardoises reflètent la lumière dorée des quais, rappelant que le patrimoine vit encore, au cœur de la ville moderne.
« On fit bâtir la Porte Cailhau, appelée quelquefois Porte Royale, comme arc de triomphe pour perpétuer la mémoire de la bataille gagnée à Fornoue par Charles VIII. »
— Abbé Patrice-John O’Reilly, Histoire complète de Bordeaux, 1857
❓FAQ pour briller en société
Pourquoi s’appelle-t-elle Porte Cailhau ?
Probablement en référence à une famille locale ou au mot gascon calhau (“caillou”).
Combien mesure-t-elle ?
35 mètres de haut, 17 mètres de large.
Était-elle fortifiée ?
Oui, dotée d’un pont-levis, d’une herse et de mâchicoulis.
Peut-on la visiter ?
Oui ! La Porte Cailhau se visite toute l’année, et la vue depuis le sommet vaut le détour.
🚪 Et les autres portes de Bordeaux ?
La Porte Cailhau fait partie d’un réseau de portes historiques :
- Porte Dijeaux (route du Médoc)
- Porte Saint-Éloi (la Grosse Cloche)
- Porte du Mirail (vers Bègles, célèbre pour sa légende du basilic de Bordeaux 🐍)
- Porte de la Monnaie et Porte Bourgogne (XVIIIᵉ s.)
📚 Sources et références
- Abbé Patrice-John O’Reilly, Histoire complète de Bordeaux, tomes II & IV (1857–1860) – Gallica BnF
- Auguste Bordes, Histoire des monuments anciens et modernes de Bordeaux, 1845
- Pierre Bernadau, Le Viographe Bordelais, 1821
- Maurice Ferrus, Le Touriste à Bordeaux, 1927
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