Histoire du Palais Rohan à Bordeaux : un palais à vies multiples (et à drapeaux changeants)

À Bordeaux, il y a des bâtiments qu’on admire… et d’autres qui gouvernent. Le Palais Rohan fait les deux, avec un talent assez rare : il traverse les régimes comme on traverse la Garonne, sans perdre sa prestance. Construit à la fin de l’Ancien Régime pour un archevêque au nom XXL (Ferdinand-Maximilien-Mériadec de Rohan-Guémenée), il devient ensuite tribunal, préfecture, palais impérial, “château royal”, puis enfin Hôtel de Ville. En clair : tu changes l’étiquette sur la porte, mais le bâtiment reste le même. Ajoute à ça deux incendies au XIXᵉ siècle (qui remodèlent surtout les intérieurs) et un attentat en 1996, et tu comprends vite que ce n’est pas un décor figé. Le Palais Rohan, c’est Bordeaux qui se réorganise, se reconstruit, se représente… et parfois se relève. Bref : une façade classique, une vie intérieure mouvementée. 😄🔥

Timeline 🗓️

• 1771 : lancement de la construction d’un nouveau palais archiépiscopal (Palais Rohan) pour l’archevêque de Rohan.
• Années 1770 : chantier principal (architectes Étienne et Bonfin, selon les notices patrimoniales).
• 1784 : fin/achèvement souvent retenu dans des synthèses pédagogiques (fin de chantier / mise en service).
• 1791 : le palais sert de tribunal criminel (Révolution).
• 1802 : il devient préfecture.
• 1808 : il est utilisé comme palais impérial.
• 1815 : il est qualifié de château royal.
• 1835 : il devient Hôtel de Ville (date d’affectation communément retenue).
• Juin 1862 et décembre 1870 : incendies, modifications surtout intérieures, et pertes/atteintes documentées.
• Nuit du 5 au 6 octobre 1996 : attentat à la bombe, dégâts matériels.

Avant le Palais Rohan : l’archevêché avait déjà du cachet… mais plus vraiment la place 👑➡️🏗️

Avant le bâtiment actuel, l’archevêque de Bordeaux dispose d’une résidence ancienne, prestigieuse, liée au voisinage immédiat de la cathédrale Saint-André. Sur le papier, c’est du lourd : position centrale, symbolique, “ça impose”. Dans les faits, on juge l’ensemble vieux, peu commode, et surtout inadapté aux standards de représentation de la fin de l’Ancien Régime. Le XVIIIᵉ siècle adore l’ordre, la symétrie, les cours d’honneur, la scénographie du pouvoir… et un vieux logis médiéval, même très noble, finit par faire “patchwork”.

C’est là qu’entre en scène l’archevêque de Rohan : il veut un palais digne de sa fonction, mais aussi un bâtiment qui colle aux ambitions d’une Bordeaux en pleine transformation urbaine. Dit autrement : on ne fait pas juste un “beau bâtiment”, on fabrique un outil de pouvoir.

1771–années 1780 : un chantier financé par le foncier (Bordeaux, déjà…) 💰🌿

Le projet démarre en 1771 : démolition de l’ancien ensemble, puis construction d’un nouveau palais archiépiscopal. Et là, détail très bordelais : le financement passe en partie par une logique foncière. Des terrains dépendant de l’archevêché (dont des zones humides et marécageuses, associées au futur secteur de Mériadeck dans les récits pédagogiques) sont vendus pour aider à financer le chantier. Ce n’est pas qu’une histoire de pierres : c’est aussi une histoire de ville qui s’étend, s’assainit, se projette.

Sur les dates, le plus rigoureux est de comprendre que les sources ne racontent pas exactement la même chose selon ce qu’elles comptent : certaines encadrent la campagne principale de construction dans les années 1770, d’autres retiennent une fin de chantier plus tardive, souvent autour de 1784. Ça n’a rien d’exotique : un bâtiment peut être “terminé” pour être habitable et administratif, puis “achevé” quand les aménagements, finitions, décors, ferronneries, distributions sont vraiment stabilisés. Le Palais Rohan, c’est typiquement ce genre de chantier où l’on ferme un dossier… puis on le rouvre.

Un palais classique “entre cour et jardin” : la mise en scène du pouvoir 😌🏛️

Le Palais Rohan est un manuel de lecture architectural grandeur nature. Tu arrives par une entrée monumentale, tu débouches sur une cour d’honneur, tu lis un corps central encadré par des ailes et des pavillons, et à l’arrière tu retrouves un jardin. La logique est simple : on guide le regard, on ordonne l’espace, on hiérarchise les circulations. Le bâtiment dit : “Ici, on représente.”

Et surtout, il se place au plus près de la cathédrale : un palais d’archevêque à deux pas de Saint-André, ce n’est pas juste pratique, c’est un message. Tu veux comprendre Bordeaux ? Regarde comment elle concentre ses symboles : le religieux d’un côté, l’administratif de l’autre, et la grande place comme scène commune.

Le détail qui amuse : parfois, le palais attend ses ornements… des décennies 🗿⌛

Dans les projets du XVIIIᵉ, on prévoit souvent des décors qui mettent du temps à arriver (ou qui n’arrivent jamais… coucou les budgets et les changements de régime). Au Palais Rohan, des synthèses pédagogiques rappellent que certaines statues prévues dans l’esprit initial sont posées bien plus tard, au XIXᵉ siècle. Moralité : même un palais “achevé” peut rester “en attente de finition” pendant une génération. Bordeaux a inventé le “à faire plus tard” avant les applis de to-do list. 😄

Révolution, Empire, royauté : le Palais Rohan devient un caméléon 🎭

C’est ici que l’histoire du Palais Rohan devient délicieuse, parce qu’elle se lit comme un résumé accéléré de l’histoire de France. La Révolution change la donne : les biens et lieux du pouvoir religieux se retrouvent réaffectés, et le palais sert notamment de tribunal criminel (1791). Ensuite, l’appareil administratif se restructure : le palais devient préfecture (1802). Puis, sous l’Empire, il est associé au pouvoir impérial et qualifié de palais impérial (1808). Enfin, en 1815, il est mentionné comme château royal.

Tu vois le principe : l’architecture reste, le drapeau change. Le Palais Rohan n’est pas une maison “privée” qui devient musée. C’est un bâtiment né pour le pouvoir… et condamné à servir le pouvoir, quel qu’il soit.

“Cet élégant édifice a subi plusieurs métamorphoses…”

Cette formule résume bien l’esprit : le Palais Rohan ne se contente pas de survivre aux régimes, il absorbe leurs fonctions.

1835 : l’Hôtel de Ville s’installe dans un ancien palais d’archevêque 🏛️➡️🏛️

Au XIXᵉ siècle, le palais bascule durablement dans l’orbite municipale : 1835 est la date d’affectation généralement retenue pour son rôle d’Hôtel de Ville. Et ce transfert n’est pas qu’un déménagement : c’est un changement de symbole.

Pendant des siècles, le pouvoir municipal bordelais a eu d’autres adresses (notamment autour de Saint-Éloi, côté Grosse Cloche). Avec le Palais Rohan, la mairie s’installe dans un lieu monumental, classique, conçu pour représenter l’autorité. C’est comme passer d’un “siège historique” un peu bricolé à une scène officielle en pleine lumière. Et, accessoirement, c’est pratique : l’endroit est central, lisible, prestigieux. Bordeaux n’a jamais eu peur d’avoir de l’allure. 😌✨

1862 et 1870 : deux incendies, des archives touchées, des intérieurs recomposés 🔥🧯

Le Palais Rohan connaît deux épisodes de feu majeurs au XIXᵉ siècle, en 1862 et 1870. Les notices patrimoniales insistent sur un point : l’impact se lit surtout dans les intérieurs (distribution, décors, aménagements). Or, quand tu touches aux intérieurs d’un hôtel de ville, tu touches aussi à ce qu’on y conserve : des documents, des registres, des fonds, des pièces administratives.

L’incendie de l’hôtel de ville de juin 1862 est particulièrement marquant : il est associé à des pertes et atteintes aux archives municipales (sans que tout disparaisse), et à des campagnes de restauration. Le feu ne détruit pas seulement des boiseries : il grignote la mémoire. Et Bordeaux, ville d’archives et de papier, sait que c’est parfois là que ça fait le plus mal.

1996 : un rappel contemporain que c’est un lieu de pouvoir 💣

Dans la nuit du 5 au 6 octobre 1996, une bombe explose et endommage une partie de la mairie. L’épisode (revendiqué, documenté, très commenté à l’époque) rappelle quelque chose de simple : le Palais Rohan n’est pas un joli décor neutre. C’est un lieu de décision, de représentation, de symboles. Et les symboles, parfois, attirent la violence politique. Heureusement, cet attentat n’a pas fait de victimes, mais il a laissé une trace dans l’histoire récente du bâtiment.

Ce que raconte le Palais Rohan quand tu le regardes autrement 👀🙂

La magie du Palais Rohan, c’est que tu peux le “lire” à plusieurs niveaux. Au niveau carte postale : c’est beau, c’est classique, ça fonctionne. Au niveau historique : c’est un bâtiment conçu pour l’archevêque, récupéré par la Révolution, recyclé par l’État, puis adopté par la Ville. Au niveau urbain : il est posé là, au cœur d’un nœud symbolique, à côté de la cathédrale, sur une place où Bordeaux met en scène son identité.

Et si tu ajoutes les incendies, les réparations, les réaménagements, tu comprends que ce palais n’est pas “resté intact” comme dans une vitrine. Il a vécu. Il a encaissé. Il s’est adapté. Et au fond, ça lui va bien : Bordeaux a souvent fait pareil. 😉

FAQ pour briller en société ✨

Pourquoi “Palais Rohan” ?
Parce qu’il est lié à l’archevêque Ferdinand-Maximilien-Mériadec de Rohan-Guémenée, qui lance le projet à partir de 1771.

C’est 1778 ou 1784, la date de construction ?
Les chronologies patrimoniales cadrent la campagne principale dans les années 1770, tandis que des synthèses retiennent un achèvement vers 1784 (fin de chantier / mise en service). Le plus juste est de parler d’un grand chantier des années 1770, finalisé avant la Révolution.

Depuis quand est-ce l’Hôtel de Ville ?
La date d’affectation la plus couramment retenue est 1835.

Les incendies ont changé le palais ?
Oui, surtout les intérieurs : réaménagements, redistribution, décors remaniés après les incendies de 1862 et 1870.

Que s’est-il passé en 1996 ?
Un attentat à la bombe a causé des dégâts matériels à la mairie (sans faire de victimes).

Sources et liens

Sources patrimoniales et institutionnelles

• POP (Ministère de la Culture), notice “Palais de Rohan… actuel Hôtel de ville (Bordeaux)” :
  https://pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/PA00083157
• Ville de Bordeaux, contenu de présentation du Palais Rohan (patrimoine / histoire) :
  https://www.bordeaux.fr/le-palais-rohan-temoin-de-lhistoire-bordelaise

Archives et mémoire (incendie 1862 / fonds touchés)

• Archives Bordeaux Métropole, notice liée aux fonds et conséquences de l’incendie de 1862 :
  https://archives.bordeaux-metropole.fr/n/bordeaux/n:258
• Musée / incendies et reconstruction (contexte 1862-1870)
• Musée des Beaux-Arts de Bordeaux, page historique (incendies 1862 et 1870, suites) :
  https://www.musba-bordeaux.fr/a-propos-de-nous/plus-de-200-ans-dhistoire/il-etait-une-fois-le-musba
• Presse (attentat 1996)
• Le Monde (archives), rappel de l’attentat à la mairie de Bordeaux :
  https://www.lemonde.fr/archives/article/2004/10/28/une-bombe-explose-dans-une-annexe-de-la-mairie-de-bordeaux_384794_1819218.html
• L’Obs / Nouvel Obs (rappel de l’explosion à la mairie) :
  https://www.nouvelobs.com/societe/20041028.OBS0194/explosion-a-la-mairie-de-bordeaux.html
• Sources imprimées (ouvrages numérisés / PDFs fournis)
• BORDEAUX-XVIIIe-SIECLE-DOSSIER-ENSEIGNANTS.pdf (Palais Rohan : financement, organisation, fonctions, décors)
• Patrice-John O’Reilly, “Histoire complète de Bordeaux” (Gallica)
  https://gallica.bnf.fr/

Photos d’archives du Palais Rohan

D’autres articles sur le Palais Rohan