Les anciens noms de la place Gambetta : Dauphine, Nationale, puis Gambetta
Quand tu flânes aujourd’hui autour du bassin central de la place Gambetta, difficile d’imaginer que cet îlot de verdure au cœur des boulevards XVIIIe a connu plusieurs baptêmes… et autant de climats politiques. D’abord place Dauphine, hommage à un héritier royal ; puis place Nationale, relookée version Révolution ; enfin place Gambetta, icône républicaine fin XIXe. Trois noms, trois époques, trois visions de la France — et toujours la même place, témoin placide des changements de régime 😌.
📜 Timeline express
- 1740-1789 → Place Dauphine 🏰
- 1792-1805 → Place Nationale 🇫🇷
👑 1. Place Dauphine : quand Bordeaux rend hommage au futur roi (1740-1789)
Lorsqu’au milieu du XVIIIe siècle Bordeaux décide d’ouvrir un vaste espace régulier au débouché de la porte Dijeaux, elle le baptise très logiquement place Dauphine. Pourquoi ? Parce que le « Dauphin », titre porté par l’héritier du trône de France, est à l’époque l’une des figures les plus honorées du royaume.

→ Dans les années 1740-1750, l’urbanisme bordelais est marqué par la grande politique d’embellissement des intendants Boucher puis Tourny. Nommer une place majeure Dauphine, c’est montrer sa fidélité au roi, mais aussi son élégance : plusieurs villes françaises possèdent alors une place Dauphine, dont Paris évidemment.
Aucune source ancienne ne suggère d’ambiguïté : la dénomination renvoie clairement au Dauphin Louis (1729-1765), fils de Louis XV, père de trois rois (Louis XVI, Louis XVIII, Charles X). Bordeaux, prospère et monarchiste, lui dédie ce nouveau cœur urbain avant même la Révolution.
Place Nationale : la Révolution renomme tout, même les pavés (1792)
Changement d’époque, changement de nom. En 1792, au moment où la monarchie s’effondre, toutes les références royales disparaissent des espaces publics. Bordeaux ne fait pas exception : la place Dauphine devient place Nationale.

Ce mouvement est très bien documenté dans les archives municipales révolutionnaires : la municipalité applique systématiquement la suppression des titres royaux dans les toponymes. Les Bordelais doivent désormais circuler dans une ville cohérente avec les valeurs nouvelles : liberté, nation, citoyenneté.
Et la pauvre place Dauphine dans tout ça ? Elle devient un symbole neutre, républicain, débarrassé de son héritier royal — une sorte de « reset » politique complet 😅.
🕊️ Place Gambetta : l’hommage à l’un des pères de la IIIᵉ République (1883)
Il faut attendre 1883 pour que la place prenne son nom actuel : Gambetta. Léon Gambetta (1838-1882), figure majeure de la IIIᵉ République, artisan de la défense nationale en 1870, président de la Chambre, chef du gouvernement… bref, un personnage que la France républicaine célèbre partout après sa mort.
Bordeaux n’est pas en reste : le conseil municipal rebaptise la place en son honneur l’année suivante.
Le choix est cohérent : Gambetta symbolise l’esprit républicain, la modernité politique, l’idée d’un pays qui se reconstruit. Il remplace logiquement une appellation neutre hérité de la Révolution pour inscrire durablement la place dans l’identité républicaine.
⭐ FAQ pour briller en société
Pourquoi “Dauphine” ?
Parce que le Dauphin est l’héritier du trône. À Bordeaux, la place rendait hommage au fils de Louis XV, le futur Louis XVI… enfin presque 😉.
Toutes les villes ont-elles eu une “place Nationale” ?
La plupart, oui ! La Révolution a standardisé les noms symboliques : Liberté, Nation, Égalité… Bordeaux a suivi le même mouvement.
Pourquoi Gambetta a-t-il autant de rues et de places en France ?
Parce qu’il est l’un des architectes de la IIIᵉ République. Après sa mort en 1882, la France républicaine lui rend hommage partout, Bordeaux compris.
📚 Sources
- Archives municipales de Bordeaux : délibérations révolutionnaires et dénominations urbaines (série 1D, 1792-1793).
- Histoire de Bordeaux — Henri Gradis, 1888 (réf. sur la période moderne). archivesmunicipa01borduoft
- Évocation du vieux Bordeaux, Louis Desgraves, 1960. histoire de bordeaux
- Bordeaux XVIIIᵉ siècle – Dossier enseignants, Place Gambetta et urbanisme des intendants. evocation du vieux bordeaux