La borne 0 de la place Gambetta : le discret témoin de la naissance du système métrique à Bordeaux

On passe devant elle sans la voir. Et pourtant, elle marque un tournant majeur de l’histoire bordelaise… et même de l’histoire de France. À l’angle du 10 place Gambetta, une petite borne de pierre, modeste, presque timide, raconte la bascule dans un nouveau monde : celui du mètre, de la Révolution et de la standardisation moderne.

Pas de mythe, pas de grande statue : juste un cylindre de pierre encastré dans un mur, qui a traversé deux siècles sans faire de bruit. Et si tu connais Bordeaux mais que tu n’as jamais entendu parler de sa « borne d’origine », rassure-toi : tu n’es pas seul. Pourtant, ce petit témoin mérite qu’on s’y attarde — ne serait-ce que pour comprendre pourquoi la Révolution est passée… même par les façades bordelaises. 😉

🕰️ Timeline historique — La Borne 0 en quelques dates essentielles

📌 1ᵉʳ août 1793 – La Convention adopte officiellement le système métrique, remplaçant les multiples unités d’Ancien Régime. Cette réforme impose l’usage du mètre dans toute la France.

📌 Fin 1793 – 1795 – Dans les grandes villes françaises, on scelle des étalons publics du mètre, souvent en pierre ou en métal, directement sur des façades.
👉 À Bordeaux, ce dispositif est installé au 10 place Gambetta, alors encore appelée place Nationale.

📌 XIXᵉ siècle – La borne reste en place malgré les transformations successives de la place (anciennement place Dauphine puis place Nationale, elle devient place Gambetta en 1883).
La source souligne clairement sa présence comme élément remarquable lors des visites pédagogiques :

« Observation de la borne origine au 10 place Gambetta : adoption du système métrique – décret du 01/08/1793. »

📌 XXᵉ siècle – aujourd’hui – Le repère est conservé, souvent ignoré, parfois redécouvert. Il demeure l’un des très rares étalons métriques révolutionnaires encore visibles en France.

Un petit bloc de pierre… et une révolution dans les mesures 📏⚖️

Avant 1793, chaque région — parfois chaque ville — utilisait ses propres unités : toises, pouces, aunes, boisseaux… Autant te dire que le commerce ou la fiscalité devaient ressembler à un casse-tête permanent.
La Révolution souhaite unifier, clarifier, rationaliser. On invente donc le mètre, tiré d’une fraction du méridien terrestre : une unité calculée scientifiquement, valable pour tous.

La mise en circulation du mètre implique alors d’installer des bornes étalon dans les grandes villes pour permettre à tout citoyen de vérifier lui-même la mesure. Bordeaux joue le jeu — d’où la présence de la borne Gambetta. Elle n’a rien d’un point kilométrique 0, contrairement à ce que certains imaginent parfois : pas de mesure routière ici, mais un étalon d’unité, une sorte de « mètre officiel » offert à la population.

Pourquoi ici, au n°10 de la place Gambetta ?

La place (alors place Nationale) se situe au cœur de la ville révolutionnaire : pas seulement un espace commercial, mais aussi un lieu hautement symbolique où fut installée… la guillotine (environ 250 exécutions). Choisir cette place pour afficher un repère métrique, c’était donc :

• le mettre au centre de la vie urbaine,
• l’intégrer dans un espace très fréquenté,
• et affirmer, dans un lieu emblématique des nouveaux pouvoirs, la modernité rationnelle voulue par la Révolution.

À quoi ressemble exactement la borne ?

Si tu te rends au 10 place Gambetta, côté rue de la Porte-Dijeaux, tu verras une petite pierre verticale enchâssée dans le mur. On l’identifie surtout grâce à sa rainure longitudinale, parfois décrite comme un simple trait de repère : elle indiquait la valeur exacte d’un mètre.

Dépouillée, sobre, typique de l’esthétique pragmatique révolutionnaire, elle n’était pas conçue pour décorer — juste pour instruire et normaliser.

Un vestige rare (et précieux) 🪨

Toutes les villes françaises n’ont pas conservé leurs bornes métriques révolutionnaires. Beaucoup ont disparu lors de travaux, d’autres ont été arrachées ou simplement oubliées.
Celle de Bordeaux fait donc partie d’un groupe très restreint d’étalons encore visibles en situation, ce qui en fait un petit trésor pour les historiens… et pour les curieux qui aiment lever les yeux en ville.

FAQ pour briller en société ✨

📍 Est-ce vraiment le « point zéro » de Bordeaux ?
Non. Ce n’est pas un repère géographique mais un étalon de mètre. Rien à voir avec un point kilométrique.

📍 À quoi servait-elle exactement ?
À permettre à chaque citoyen de vérifier la mesure du mètre introduit en 1793 et d’éviter les fraudes.

📍 Pourquoi à Gambetta ?
Parce que c’était un espace central et symbolique, fréquenté quotidiennement, et un lieu choisi par les autorités pour afficher les réformes révolutionnaires.

📍 Existe-t-il d’autres bornes similaires en France ?
Très rarement : Paris en conserve une (rue de Vaugirard), mais beaucoup ont disparu. Celle de Bordeaux est donc l’une des dernières visibles.

Sources

• BORDEAUX XVIIIᵉ siècle – Dossier enseignants, mention explicite de la borne d’origine au 10 place Gambetta et de son lien avec le décret du 01/08/1793.
  
• Informations historiques sur la place Gambetta (anciennement place Dauphine puis place Nationale).