1906 — Le Pont de Pierre, Pont Bacalan-Bastide avant l’heure

e savais-tu ? En 1906, Bordeaux rêvait déjà d’un nouveau pont sur la Garonne… un siècle avant le pont Chaban-Delmas ! L’idée n’était pas encore de relier Bacalan à la Bastide, mais bien d’imaginer un pont mobile moderne, capable de laisser passer les navires sans bloquer la circulation terrestre. Autrement dit : un “Bacalan-Bastide avant l’heure”, en plein cœur du Bordeaux Belle Époque.

À l’époque, la ville déborde d’énergie industrielle : les quais bourdonnent, les chantiers navals tournent à plein régime, et le vieux Pont de Pierre, construit sous Napoléon, commence à montrer ses limites. Trop étroit, trop bas, trop figé. Alors, ingénieurs et architectes planchent sur une solution visionnaire : un pont à travées mobiles ou un pont transbordeur, symbole du progrès et de la modernité. Les esquisses de 1906, notamment celles d’Eugène Ferret, montrent un Bordeaux audacieux, prêt à révolutionner son fleuve.

Mais comme souvent dans cette ville patiente et prudente, le rêve resta sur papier. Il faudra attendre plus d’un siècle pour que le pont Chaban-Delmas concrétise cette idée folle d’un ouvrage levant reliant les deux rives — preuve que Bordeaux a parfois de très longues gestations pour ses grandes idées 💡

⏳ Timeline : Bordeaux et ses ponts rêvés

• 1822 : le Pont de Pierre est inauguré, premier lien fixe entre les deux rives
• 1885 : un ingénieur nommé Archambeaud propose un tunnel sous la Garonne (déjà !)
• 1906 : projet d’un pont à travées mobiles, imaginé par Eugène Ferret — le concept d’un pont qui s’ouvre pour laisser passer les bateaux
• 1910 : autre projet, encore plus spectaculaire : un pont transbordeur façon Rochefort ou Marseille, signé Ferdinand Arnodin
• 1954 : au lieu de le remplacer, on élargit le Pont de Pierre — solution plus raisonnable mais moins poétique
• 2013 : inauguration du pont Chaban-Delmas, le descendant spirituel des utopies de 1906 🚢

💭 Le projet de 1906 : un rêve de modernité

Le dossier de 1906 parle d’un « pont à travées mobiles », imaginé pour fluidifier la navigation tout en gardant un passage urbain. Ce pont aurait comporté des sections relevables ou détachables, un peu comme une mâchoire de métal s’ouvrant sur la Garonne. Un concept visionnaire pour l’époque, qui anticipait les grands ouvrages du XXᵉ siècle.

Pourquoi un tel projet ? Parce qu’à la Belle Époque, Bordeaux est déjà une capitale du commerce maritime. Les grands voiliers et vapeurs doivent remonter la Garonne jusqu’aux quais des Chartrons. Le Pont de Pierre, lui, est un mur : sa structure empêche le passage de navires hauts, forçant les capitaines à s’arrêter bien avant le centre-ville.

L’idée d’un pont mobile semble alors révolutionnaire : faire cohabiter bateaux et calèches, modernité et patrimoine. Les plans sont dessinés, les ingénieurs consultés… mais le projet s’enlise. Trop coûteux, trop complexe, trop audacieux pour l’époque.

🚫 Les raisons de l’échec

• Un défi technique : la Garonne est capricieuse. Courants puissants, crues, marées… difficile d’y ancrer un mécanisme mobile sans risquer la catastrophe.
• Un coût astronomique : les finances de la ville ne permettent pas de financer un tel chantier.
• Une symbolique trop forte : toucher au Pont de Pierre, c’était presque un sacrilège. Ce monument napoléonien faisait déjà partie de l’identité bordelaise.
• Une vision trop en avance : en 1906, on pense encore en pierre et en acier, pas en hydraulique ni en automatisme.

Résultat : le dossier finit dans les archives, entre deux esquisses d’ingénieurs et quelques rêves de modernité avortés.

⚙️ D’autres ponts imaginés, jamais construits

Bordeaux ne manque pas d’imagination. Outre le projet de 1906, la ville a connu plusieurs grands rêves suspendus :

• Le tunnel fluvial (1885) : censé relier les deux rives sous la Garonne, abandonné avant même la phase d’étude.
• Le pont transbordeur (1910) : deux immenses pylônes, un tablier suspendu, un ballet mécanique sur le fleuve… arrêté net par la Première Guerre mondiale.
• Le doublement du pont de pierre (années 1930) : un projet d’ouvrage jumeau pour délester le trafic. Jamais réalisé non plus.

🤓 FAQ pour briller en société

🚢 Pourquoi voulait-on un pont mobile ?
Pour permettre aux bateaux à grands mâts d’accéder au port de la Lune sans se heurter au Pont de Pierre.

💰 Pourquoi le projet n’a-t-il jamais vu le jour ?
Entre le coût, la complexité technique et la crainte d’abîmer le pont historique, la mairie a préféré garder ses pieds sur terre… ou plutôt sur pierre.

🌉 Le pont Chaban-Delmas est-il son héritier ?
Oui ! Il réalise enfin le rêve d’un pont levant bordelais, imaginé dès la Belle Époque. Comme quoi, à Bordeaux, les grandes idées prennent juste un siècle à mûrir 😉

📚 Sources pour aller plus loin

• Société Archéologique de Bordeaux – Études sur les ponts à travées mobiles (1906-1921)
• UNA Éditions – Le Pont de Pierre de Bordeaux a 200 ans
• Archives Bordeaux Métropole – Un pont en ville : enquête sur le Pont de Pierre
• Wikimedia Commons – Projet de modification du Pont de Pierre par Eugène Ferret (1906)
• Wikipédia – Pont de Pierre (Bordeaux)