Inondation de Bordeaux 1875 : la grande crue de la Garonne

Faits Divers
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Il existe des années qui s’impriment dans la mémoire d’un fleuve, et 1875 est l’une d’elles. Cette date reste associée à une inondation majeure à Bordeaux, consécutive à la grande crue de la Garonne de juin 1875, un événement dévastateur qui a profondément marqué le Sud-Ouest. Alors que l’été approchait, un épisode météorologique hors norme frappait les Pyrénées : pluies diluviennes, fonte tardive des neiges, sols saturés… Tout convergeait pour créer un phénomène que l’on qualifiera bientôt de « déluge », l’Aïgat.

Cette montée exceptionnelle des eaux, d’abord meurtrière en amont, parvint à Bordeaux quelques jours plus tard, transformant la Garonne en un fleuve sombre, puissant, inquiétant. Pour comprendre l’inondation de Bordeaux en 1875, il faut suivre pas à pas la progression de cette crue historique, de Toulouse jusqu’au port de la Lune.

🌧️ Comment l’inondation historique de 1875 s’est formée

Le mois de juin 1875 cumule tous les facteurs de risque :

  • une fonte des neiges très tardive ;
  • des pluies extrêmes sur le piémont pyrénéen ;
  • des sols saturés ;
  • des affluents de la Garonne en crue simultanée.

Dans l’Ariège, dans le Tarn et dans les vallées du Sud-Ouest, les niveaux dépassent tout ce qui avait été observé jusqu’alors. Le 23 juin, à Toulouse, la Garonne atteint 8,32 mètres au Pont-Neuf, un niveau record associé à un débit estimé à plus de 7 500 m³/s — du jamais-vu pour le bassin garonnais. Cette montée brutale va former l’une des crues les plus violentes du XIXᵉ siècle et causer par en endroit des débordements de 3m de haut.

Inondation à Bordeaux en 1875
Inondation à Toulouse en 1875 – Source BnF

🔹 Valeurs de référence du débit de la Garonne

  • Débit normal : 400 à 900 m³/s
  • Débit en période de pluies soutenues : 1 000 à 1 500 m³/s
  • Débit lors d’une crue notable : 3 000 à 4 000 m³/s
  • Crue exceptionnelle : plus de 6 000 m³/s
  • Record historique amont (1875) : > 7 500 m³/s

🌊 23–24 juin 1875 : l’Aïgat, un déluge qui dévaste le Sud-Ouest

À Toulouse, l’inondation est cataclysmique. Les quartiers bas disparaissent sous les eaux, plusieurs ponts s’effondrent, des maisons sont emportées. Le bilan est terrible :

  • 208 morts reconnus dans l’agglomération toulousaine,
  • 300 victimes selon certains rapports,
  • et 476 morts comptabilisés sur l’ensemble des départements touchés.

Plus de 1 200 maisons sont détruites dans la seule région toulousaine. Cette catastrophe va mettre en mouvement la Garonne vers l’aval, et l’inondation va toucher progressivement tout le bassin, jusqu’à Bordeaux.

Inondation à Bordeaux en 1875
Inondation à Toulouse en 1875 – Source BnF

🚢 L’inondation à Bordeaux en 1875 : montée du fleuve et dégâts locaux

La crue n’a pas submergé Bordeaux comme Toulouse, mais la montée exceptionnelle des eaux demeure un épisode marquant de l’histoire fluviale bordelaise. Entre le 26 et le 28 juin, la Garonne arrive dans la ville à un niveau inhabituellement haut : le fleuve est largement débordant, brun, chargé de débris arrachés en amont.

Les quais du Port de la Lune subissent des inondations ponctuelles. Dans les quartiers bas — Chartrons, Bacalan, Saint-Michel — les caves se retrouvent remplies d’eau et certaines zones sont impraticables. Le port, nerveux centre économique de la ville, doit interrompre une partie de ses opérations : barriques perdues, marchandises endommagées, pontons fragilisés.

L’un des éléments aggravants de l’inondation bordelaise de 1875 vient de la marée montante, qui ralentit l’écoulement du fleuve et retient temporairement l’eau, créant un niveau inhabituel dans plusieurs secteurs. Bordeaux ne déplore pas de victimes, mais l’événement reste dans les mémoires comme l’une des crues les plus impressionnantes jamais observées dans la ville.

🏚️ Un traumatisme régional et une prise de conscience nationale

La crue de 1875 devient immédiatement une affaire nationale. L’État dépêche ingénieurs, hydrologues et secours sur tout le bassin. Les dégâts sont colossaux :

  • des milliers d’habitations détruites ou inhabitables,
  • des terres agricoles ravagées,
  • un réseau économique paralysé,
  • un traumatisme durable pour les régions sinistrées.

Bordeaux, en aval, prend pleinement conscience qu’elle n’est jamais à l’abri d’une inondation majeure provoquée très loin en amont. Cette catastrophe devient une référence pour la gestion future des crues du fleuve.

🧠 Ce que l’inondation de 1875 a laissé dans l’histoire de Bordeaux

Il subsiste de 1875 :

  • des relevés hydrométriques encore utilisés comme référence ;
  • des photographies anciennes documentant l’inondation du Sud-Ouest ;
  • de nombreuses études historiques, dont celles de Jean-Claude Yvard sur les inondations bordelaises depuis le XVe siècle ;
  • une mémoire collective qui associe toujours 1875 à « l’Aïgat », la grande crue.

L’inondation de Bordeaux en 1875 reste l’un des épisodes les plus emblématiques de la relation parfois tumultueuse entre la ville et la Garonne.

FAQ inondation Bordeaux 1875 🔍

La crue a-t-elle réellement touché Bordeaux ?
Oui. Elle n’a pas détruit la ville, mais elle a provoqué une montée exceptionnelle du fleuve, des caves inondées et un important désordre portuaire.

Pourquoi parle-t-on d’Aïgat ?
C’est le nom occitan donné à la crue de 1875 : il signifie “déluge”, tant l’événement fut brutal et meurtrier.

Beautiran, Agen, Marmande… ont-ils été touchés ?
Oui : tout le bassin garonnais a subi des dégâts majeurs sur le trajet de la vague.

Sources

  • Yvard Jean-Claude — Les inondations à Bordeaux depuis le XVe siècle (Annales du Midi, 1996)
  • Tolosana (Bibliothèque de Toulouse) — Album photographique des inondations de juin 1875
  • Colloque scientifique AÏGAT 1875 — SciencesConf
  • Wikipédia — Crue de la Garonne en 1875

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