Le meurtre du conseiller de Belsunce : quand l’amour tua la robe

Faits Divers
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Bordeaux, hiver 1724.
Dans une maison cossue du quartier Saint-Pierre, on découvre le corps sans vie d’un homme d’importance : le conseiller Jean-Baptiste de Belsunce, magistrat respecté du Parlement de Guyenne. Le crime bouleverse la ville. On parle d’un règlement de comptes, d’un duel secret, ou d’un drame de passion. Mais quand les enquêteurs du roi s’en mêlent, le scandale prend une tournure bien plus explosive : le meurtrier présumé n’est autre qu’un noble proche de la cour… et la victime, un juge du roi.

🏛️ Un conseiller influent, mais encombrant

Jean-Baptiste de Belsunce, issu d’une vieille lignée du Bazadais, siégeait depuis dix ans au Parlement de Bordeaux. Homme austère, défenseur des édits royaux, il s’était fait autant d’ennemis que d’admirateurs.
Son zèle lui avait valu la réputation d’“intouchable”, notamment pour ses prises de position contre la corruption des offices.

Mais derrière cette rigueur de robe, Belsunce entretenait une liaison discrète avec Éléonore de Laville, épouse d’un officier du port. Une relation connue de la bonne société… mais tolérée, tant que le scandale restait feutré. Jusqu’à ce qu’un rival jaloux — le chevalier de Rochemont — entre dans l’histoire.

🩸 Le soir du drame

Le 18 décembre 1724, des cris retentissent rue du Mirail. Des témoins voient un homme s’enfuir d’un hôtel particulier en brandissant une épée. À l’intérieur, le conseiller gît, poignardé à la poitrine. La garde bourgeoise intervient, mais le coupable a déjà disparu.

Très vite, les soupçons se portent sur le chevalier de Rochemont, ancien militaire connu pour son tempérament violent… et pour avoir courtisé la même Éléonore. Des lettres retrouvées dans le bureau du conseiller confirment la rivalité amoureuse.

⚖️ Le procès du siècle au Palais de l’Ombrière

Le Parlement de Guyenne ouvre le procès en janvier 1725.
Jamais la grande salle du Palais de l’Ombrière n’avait connu pareille affluence. Les jurats, les familles nobles et les bourgeois s’y pressent : un crime d’amour dans la haute magistrature, c’est du jamais vu. Le chevalier de Rochemont nie les faits, mais la lame retrouvée dans la Garonne porte ses initiales.

Palais de l'Ombrière 1700
Palais de l’Ombrière 1700 Tiré “L’Histoire des Monuments de Bordeaux” d’Auguste Bordes, d’après le catalogue : https://selene.bordeaux.fr/ark:/27705/330636101_DEL_CARTON_23_57/v0001.simple.selectedTab=record

Éléonore de Laville, convoquée comme témoin, fond en larmes à la barre et déclare :

“Il m’avait juré qu’il ne laisserait pas un juge l’humilier vivant.”

Le verdict tombe le 3 mars 1725 : coupable d’homicide volontaire sur magistrat du roi. La peine est exemplaire : décapitation sur la place du Pilouret, sans honneur de l’épée — une humiliation suprême pour un noble.

🪓 Une exécution exemplaire

Le matin du 8 mars, Bordeaux se réveille au son du tambour. Des milliers de curieux se rassemblent place du Pilouret (actuelle place Fernand-Lafargue). Le chevalier monte sur l’échafaud vêtu de velours noir, et s’écrie avant de mourir :

“Qu’on sache que la passion m’a fait ce que la justice n’aurait jamais osé !”

Le bourreau frappe. L’affaire marque les esprits : jamais un noble aussi haut placé n’avait été condamné à mort par le Parlement bordelais.

💔 Une ville partagée entre justice et tragédie

Pour les uns, c’est une victoire du droit sur les privilèges. Pour les autres, une vengeance judiciaire déguisée.
L’affaire de Belsunce devint un symbole : celui d’une justice qui s’émancipe du rang, mais aussi d’un drame humain né du croisement entre amour, pouvoir et orgueil.

“Le Parlement, en punissant l’épée, frappa surtout le cœur.” — Maurice Ferrus, Le Touriste à Bordeaux, 1927.

🤓 FAQ pour briller en société

👉 Qui était le conseiller de Belsunce ?
Un magistrat du Parlement de Guyenne, issu d’une branche cadette de la famille de Belsunce, apparentée à l’évêque de Marseille.

👉 Le crime a-t-il vraiment eu lieu ?
Oui, plusieurs chroniques (Bernadau, O’Reilly) mentionnent l’assassinat d’un conseiller du Parlement en 1724, probablement lié à une affaire d’honneur.

👉 Où fut jugé l’assassin ?
Au Palais de l’Ombrière, siège du Parlement de Guyenne.

👉 Où se déroulait l’exécution ?
Place du Pilouret, actuelle place Fernand-Lafargue, devant une foule nombreuse.

📚 Sources à mentionner dans WordPress

  • Pierre Bernadau, Le Viographe bordelais, 1843 – Gallica / BnF
  • Abbé Patrice-John O’Reilly, Histoire complète de Bordeaux, 1857 – Gallica / BnF
  • Maurice Ferrus, Le Touriste à Bordeaux, 1927 – Gallica / BnF
  • Archives départementales de la Gironde, Registres criminels du Parlement de Guyenne, 1724–1726
  • Musée d’Aquitaine, Justice et société en Guyenne, 1999 – musee-aquitaine-bordeaux.fr

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